Charge de la preuve en matière de faute grave

Charge de la preuve en matière de faute grave

Publié le : 02/07/2025 02 juillet juil. 07 2025

Tout litige en matière de licenciement pose la question suivante : à qui incombe la charge de la preuve ?

Définition : La preuve désigne tout acte ou fait juridique visant à soutenir une prétention pour établir les allégations des parties au litige.

Adage : « ne pas pouvoir prouver son droit équivaut à ne pas avoir de droit »

En droit du travail, le licenciement est un mode de rupture du contrat qui peut revêtir plusieurs formes (motif personnel, économique…). L’employeur qui souhaite rompre le contrat doit être en mesure de justifier d’un motif légitime.

Qu’en est-il en matière de faute grave ?

La faute grave se définit comme l’acte volontaire du salarié qui rend intolérable et impossible de maintien de celui-ci sur le lieu de travail.

En principe, la faute se traduit par un manquement aux obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail.

Lorsqu’un salarié a commis un acte volontaire et suffisamment grave, l’employeur peut le sanctionner sur le terrain disciplinaire par le licenciement.

La jurisprudence établit que la charge de la preuve en matière de faute grave incombe à l’employeur.

« la charge de la preuve de la faute grave incombant exclusivement à l’employeur, le salarié n’a rien à démontrer »

Cour de cassation, Chambre sociale, 10 avril 2019, 17-24.772

En somme, l’employeur doit démontrer la réalité et la gravité des actes du salarié justifiant le licenciement de nature à rendre impossible le maintien du contrat de travail.

Lorsqu’un doute subsiste, il profite au salarié.

Quelles sont les preuves acceptables ?

Toutes preuves matérielles tels que : des témoignages, documents écrits, courriels, rapport d’enquête interne etc… sont acceptables.

Il convient de remarquer qu’en matière prud’homale, la preuve est dite « libre ».

Selon l’article 1358 du Code Civil :

« Hors les cas où la loi en dispose autrement, la preuve peut être apportée par tout moyen. »

En droit du travail, la preuve dite déloyale est reconnue dans certain cas et selon des critères de proportionnalité et de nécessité.

Alors la jurisprudence évolue en ce sens, par exemple :

La Cour de cassation – Chambre sociale – 25 septembre 2024 – n°23-13.992 juge que l’usage de la preuve illégale par l’atteinte à la vie privée du salarié ne doit pas forcément être écartée du procès.

Cette affaire s’articule autour d’un employeur qui a eu accès à la clé USB d’une salariée, contenant des informations copiées sur l’entreprise.

Il est établi que le fait de copier ou imprimer des documents confidentiels de façon à porter atteinte aux intérêts de l’entreprise constitue une faute grave qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Deux critères doivent être pris en compte :
  • Le caractère indispensable de cette preuve ;
  • La proportionnalité du but poursuivi.

Dans cet arrêt, l’employeur qui a consulté le contenu de la clé USB de sa salariée avait pour but de préserver les intérêts de son entreprise.

Ainsi, une telle preuve peut être recevable bien que la clé USB, considéré comme personnelle a été lue en l’absence de consentement de son propriétaire

Quant au juge, il dispose d’un pouvoir lui permettant d’ordonner la production d’une preuve, sous astreinte ou non. Les parties sont tenues de respecter les demandes du juge, qui en tire à défaut toutes conséquences utiles.

Tina Milutinovic et Bénédicte Anav.

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